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Texte : Isabelle Aubailly
© Zoé Chaudeurge
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« Mettre en scène et en volume les moments de vie dans un cadre à l’image de ses propriétaires ».
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Entre Montpellier et la mer, les architectes Julien Brengues et Lionel Le Pavec, ont réinventé la vie d’un entrepôt. Repenser un lieu et prendre appui sur l’existant pour l’inscrire dans un nouvel objectif de vie.
Il s’agissait dans ce cadre d’améliorer le bâti et sa relation à l’environnement dans un esprit de renouvellement urbain. L’enjeu était de proposer une typologie d’habitat adaptée au climat et aux usages méditerranéens en composant avec le caractère industriel du lieu.
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Entre technicité ajustée et jeu de construction, les architectes invitent la lumière naturelle à recomposer le lieu.
La structure métallique a été conservée et la création de patios et de cours intérieures accessibles depuis chaque pièce ont permis l’apport de lumière naturelle. Dessiné tel une « faille » lumineuse, l’extérieur devient ici l’élément central. Les architectes invitent la nature à entrer avec des façades intérieures composées de grands vitrages effaçant ainsi les limites dedans-dehors. Les matériaux restent apparents, le métal, le verre, le bois et tissent la trame des volumes.
À l’intérieur, deux cubes vêtus de bois de noyer structurent l’espace. Ces volumes abritent des espaces techniques, cellier, buanderie, vestiaire ou encore sanitaires. La transparence du verre allume les façades de bois sombre. La lumière traverse, s’engouffre et s’enroule, perçant le mystère de ces murs métalliques.
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Cet espace de vie est un écho vibrant au savoir-faire des architectes et l’occasion manifeste de mettre en scène l’espace, la lumière et le végétal. 200 m2 de murs industriels ont fait le grand saut sous l’impulsion volubile de Julien et Lionel, déployant ici un sens inné du design et de la réhabilitation d’un lieu impropre à une habitation. Les perspectives réinventées par des patios végétaux, les cubes intérieurs en bois de noyer, gardent à l’ensemble l’esprit « Loft » voulu par les propriétaires.
Pratiquant l’art de l’alternance, on navigue entre surfaces froides et chaleureuses, douceur et intensité, entre profondeur et transparence. Sensation de confort avec le bois de noyer et un éclairage subtil mais aussi un mobilier chaleureux comme les canapés de forme arrondie très confortables et les tapis immenses. L’accès aux chambres se fait par un jeu d’escalier caché entre les cubes. On retrouve dans chaque suite la structure métallique apaisée par un béton ciré clair au sol et l’utilisation de textiles élégants. On imagine des dîners animés autour de l’immense cuisine face au patio végétalisé et son bassin d’eau claire. L’architecture livre ici une partition qui se concentre sur l’essentiel.
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Rencontre avec Julien Brengues & Lionel Le Pavec
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La structure métallique est-elle une construction possible dans notre région ?
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Dans le cadre du projet, la structure et la charpente métallique étaient déjà présentes. Il s’agissait d’un ancien entrepôt. Nous avons pris le parti de composer avec cette ossature et conserver cette écriture industrielle, plutôt que de tout démolir. Il est vrai que la minéralité et l’inertie qu’apportent des matériaux comme la pierre ou le béton sont traditionnellement plus performants dans les régions chaudes. Nous avons donc travaillé sur divers tableaux afin d’apporter les performances énergétiques et d’isolation nécessaires. Un système de double isolation a par exemple été appliquée en toiture. Un système de bandeau double peau fait la liaison avec les grandes baies vitrées.
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Pour l’aménagement intérieur quels matériaux avez-vous utilisé ?
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Le dallage existant était ancien et peu adapté au lieu, il a été complètement déposé. Nous avons profité de cette suppression pour intégrer une grande majorité des réseaux. Afin de rester dans l’esprit industriel et dans un souci d’unité, l’ensemble du volume a retrouvé un dallage béton, finition quartzé. Les façades en verres autour des patios étant importantes, nous avons notamment utilisé des panneaux en noyer pour rendre chaleureux les espaces depuis l’intérieur.
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La cuisine et les salles de bain ont-elles été conçues par vous ?
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Nous pensons que le mobilier fait partie intégrante du projet et doit être en cohérence avec l’ensemble. C’est ce qui peut renforcer l’idée d’un projet unique et sur mesure. Nous apprécions donc lorsque nos clients nous confient cette commande. Nous établissons des intentions et propositions pour chacune des pièces. Un choix se portent alors concernant les robinetteries ou éclairages par exemple. Nous dessinons les meubles, qui sont ensuite réalisés par un menuisier. Pour la cuisine qui est assez conséquente et très visible, il s’agissait de lui rendre une certaine humilité tout en répondant aux panneaux en noyer du volume cave à vin. Le choix du noir s’est rapidement imposé. Il s’agissait de mettre en valeur les volumes abritant les caves à vins, cellier ou vestiaires, très présent dans le projet. Nous avons proposé de les habiller avec des panneaux en noyer, matériau noble, et qui a la faculté d’apporter une sensibilité chaleureuse dans cet environnement de métal et de verre. Lorsque nous avons dessiné les meubles de salles de bains, nous avons également souhaité utiliser ce matériau pour avoir une cohérence d’ensemble. On le retrouve sur le meuble TV et cheminée par exemple.
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Comment avez-vous géré l’éclairage de ce grand espace ?
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L’entrepôt ne présentait aucune ouverture. L’idée a été de supprimer une partie du toit pour créer une « faille lumineuse » et générer des patios. Les façades sont très largement vitrées de manière à apporter la lumière naturelle. Lorsque vient le soir, deux échelles d’éclairages ont été travaillées. Un premier système de suspensions dans les parties où la hauteur est importante, et des éclairages d’appoint, plus intimes et plus précis selon l’usage qui leur est dédié. Une attention particulière a été apportée à l’éclairage extérieur des patios, que nous considérons comme des pièces à part entière dans cette réalisation.
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Quelles sont vos idées pour structurer un grand espace comme un loft ?
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Occuper un grand volume est un bel excercice, mais nous nous sommes rapidement rendus compte qu’il pouvait être vite rempli. La logique de l’habitation et les mœurs demandent à ce que les pièces soient toutes cloisonnées et que chacun puisse avoir son intimité. Nous voulions néanmoins conserver cette lecture de grand espace. Pour cela, nous avons positionné deux « boîtes » en position centrale, faisant la transition entre les zones chambres et espaces de vie. D’un point de vue spatial, ces « boîtes », marquées par leur habillage en noyer, ne sont pas en contact avec les plafonds et les murs. Ce sont des volumes placés au milieu d’un autre. Pour chacune de ces boîtes, un escalier, lui aussi habillé de bois, permet l’accès à une mezzanine. Une bibliothèque est intégrée dans le volume du salon. Une cave à vin et un espace de dégustation sont intégrés dans celui de la cuisine. De cette manière, et depuis les espaces de vies, une perception de vide est prolongée. On peut tourner autour, suggérer une ambiance différente de l’autre côté ou sur les mezzanines qui surplombent le salon et la cuisine.
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Comment meubler un loft ?
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Il y a certainement plusieurs manières de meubler un loft. Notre parti a été l’intégration des usages dans des éléments menuisés. Les « boîtes » en noyer intègrent caves à vins, niches, bibliothèques, et abritent les zones cachées tels que cellier, buanderies, vestiaires… Notre souhait était de mettre en avant les volumes et avoir une cohérence d’ensemble avec le noyer comme facteur chaleureux.
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Comment a été travaillée la partie végétale ?
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Dès la première esquisse et la volonté de créer des patios, nous avions l’idée d’offrir une végétation dense et luxuriante, dans l’esprit jungle. Il s’agissait de l’espace le plus visible de la maison et qui marquerait son identité. Cette ambiance hors du temps génère une atmosphère singulière au lieu.
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www.brengues-lepavec.com